blueEnergy est née d’un engagement dans un lieu précis, la Côte Caribéenne du Nicaragua. Cet engagement a demandé une flexibilité du modèle afin de permette de s’adapterau contexte local. Ceci est une approche fondamentalement différente de celle de beaucoup d’autres organisations qui développentun produit ou un service et cherchent ensuite un “marché” adapté pour l’y implémenter.
Par Mathias Craig – Quel est donc le contexte de cet endroit? Les communautés dans cette région sont extrêmement isoléeset pauvres, mais encore plus grave, l’accès à la plupart des services basiquescomme l’électricité, les routes, l’eau potable, les télécommunications etle financement font cruellement défaut. Ceux-ci sont les services en particulier sur lesquels les entrepreneurs se reposent et qu’ils valorisent pour pouvoir lancer leur entreprise dans un contexte d’économie de marché, et même dans des communautés pauvres tout en bas de la pyramide économique eten marge du marché. Mais là-bas, l’entreprenariat est étouffé sans ces services basiques. La question est donc de savoir comment lancer la machine du développement économique afin que les populations puissent elles-mêmes subvenir à leurs besoins?
Pour résumer rapidement ce qui est déjà une longue histoire, blueEnergya débuté comme une organisation spécialisée dans l’éolien, en construisant et installantdes systèmes d’énergie sur la Côte Caraïbe. Nous avons organisé de nombreuses formations et discussions avec les communautésmais étions focalisés sur la technologie. Au fur et à mesure que notre compréhension ducontexte local s’approfondissait, il devenait clair que pour avoir un réel impact, nous aurions besoin d’élargir les services dérivés de l’énergie. De telle manière qu’en plus de la production d’énergie, nous devrions aussi nous impliquer dans la gestion de l’énergie et ses usages. En raison du contexte il n’était pas possible de supposer que énergieen entrée = usage productif en sortie parce que beaucoup de maillons de la chaine sont manquants.
Après encore deux ans, en regardant autour de nous nous voyions la quantité inimaginable d’efforts dépensés dans le développement de relations, infrastructure et procédés afin d’atteindre les communautés les plus isolées et marginalisées. Cela n’avait pas de sens de faire tout cet investissement pour être le dernier camp détachéau plus près et pourtant encore loin de ces communautés, et de limiter notre service à la production d’énergie. Il était au contraire plus judicieux de capitaliser notre investissement déjà réalisé et d’en démultiplier ses effets afin de créer de l’impact dans les mêmes communautés dans d’autres secteurs que l’énergie comme par exemple l’eau potable. En fin de compte, un changement du système requiertune combinaison de services, pas un seul isolé.
Nous avions évolué vers une organisation de développement communautaire avec une approche intégrale, utilisant les énergies renouvelableset l’eau potable conjointement avec d’autres services de manière à stimuler l’entreprenariat local.
Mais employerun modèle de développement intégralsemblable dans des conditions aussi difficilesa des implications: d’une part, votre travail avance lentement. Tout est basé sur les relations que vous avez tissées, lesquellesforment toujours une toile incomplète. La culture aussi tend à vouloir freiner les changements trop rapides, ce qui limite la vitesse à laquelle vous pouvez avancer. Finalement, avancer même lentement dans ces conditions consomme beaucoup de vos ressources.
Notre impact allait en grandissant, gagnant en profondeur. Nous évitions les actions ponctuelles et interventions en dent de scie pour nous focaliser sur la créationd’un changement continu en profondeur chez des groupes de gens de taille modeste (environ 3000 en 2010). Mais il est difficile de mesurer la profondeur d’impact, alors qu’il est aisé de mesurer le nombre de bénéficiaires, c’est pourquoi notre impact est parfois plus difficile à apprécier. Il est par exemple facile de distribuerun conteneur rempli de lampes solaireset de proclamer 10000 personnes “impactées”; il est en revanche beaucoup plus difficile de travailler main dans la main avec des gens pour comprendre leur culture, développer des projets conjoints, construire une infrastructure et la relier à des activités qui changent la vie de ces gens. Cette dernière approche, celle utilisée parblueEnergysur la Côte Caribéenne du Nicaragua, donne un bonrapport ressource / ”profondeur d’impact” mais un mauvais rapport ressource / “nombre de personnes impactées”, qui est pourtant celui qui est le plus facilement compris par la plupart des gens.
De la même manière, le besoin d’une croissance au niveau de l’organisation facilement compréhensible par les gens (c’est-à-dire du nombrede bénéficiaires) pouvait être ressentie de tous côtés, depuis le personnel de l’organisation en passant par les co-fondateurs et les donateurs jusqu’au public général. Notre engagement pour un modèle “d’impact profond” sur la Côte Caribéenneetle fait que le contexte particulier de cet endroitcontraigne la croissance de notre “nombrede bénéficiaires” à rester organique nous ont poussés à nous demander de quelles autres manières nous pourrions étendre à plus grande échelle notre impact.
Durant la dernière phase de notreévolution, en 2010, nous avons observé que nous avions différents types d’impacten dehors des communautés les plus marginalisées, et que nous avions aussi un rôle à jouer dans des domaines plus vastes où nous pourrions développer notre impact à moindre coût, et ce à travers deux mécanismes – l’imitation et la construction du mouvement.
A suivre dans ladeuxième partie.
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